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mercredi 1 juin 2016

critique de "réparer les vivants" mise en scène de Emmanuel Noblet

Réparer les vivants.
Non pas une réécriture dramatique mais une adaptation théâtrale, partition pour 1 seul interprète.
Inutile de présenter le roman de Maylis de Kerangal, qui a connu un succès mérité et dont une version cinématographique va sortir prochainement.
« Réparer les vivants » fait allusion à une citation de Platonov de Tchekhov, prononcée à la toute fin du spectacle, comme elle figure dans le livre.

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La version d'Emmanuel Noblet respecte à la fois la chronologie du texte et la course contre la montre pour la transplantation d'un organe d'un patient décédé à un patient en attente.
Le spectacle respecte aussi la foison de personnages et d'histoires individuelles qui gravitent autour de la mort cérébrale de Simon Limbres.
Un seul comédien sur scène, presque toujours en face à face avec le public. Pas d'accessoire ni de décor, ou si peu... Deux chaises qui se transforment ou qui ponctuent et rythment l'action.
L'écran de fond de scène martèle l'avance du temps, ou proclame le non-dit : les textes de lois, les mails, les dossiers...
Les personnages se succèdent, différents par une attitude, un geste, un vêtement, un accessoire, un jeu de lumière... dans une connivence partagée. « je deviens maintenant X... » « Tiens l'acteur nous montre maintenant X... et nous acceptons de le croire dans ce changement.» Par de sur-interprétation, une phrase du roman apporte le geste connoté ou les pensées qui animent le personnage. Il n'est donc pas utile de les montrer dans le jeu.
La force de ce spectacle tient surtout dans la volonté de restituer le roman dans son écriture. De ne pas en faire du théâtre. La tentation est présente : des voix off viennent dialoguer avec l'unique interprète. Des scènes sont rejouées, le comédien assumant les différents personnages (Juliette et Simon par exemple).
Non je le dis la force de ce spectacle est de ne pas être « théâtral » dans le mauvais sens du terme. Jamais, il n'est fait appel au pathétique, aux sentiments de la passion. Tout est en retenu. Le récit jouxte le dialogue, s'y mêle, sans dérouter le spectateur. On est presque à la limite du conte.
La voix dit, raconte et le corps vient la soutenir au besoin.
Le spectateur est posé sur scène, à la limite de la scène, dans son statut de spectateur et surtout dans son statut d'auditeur. Les personnages semblent parfois faire partie de lui et il se trouve alors confronté (sans avoir le droit d'oraliser son avis) aux choix, aux hésitations et aux décisions...

Réparer les vivants,