Retour sur la rumination des
performances du texte.
Après un entracte plus généraliste
et une petite pause poétique, je recentre ma rumination sur La
Maison de Matriona et
Réparer les vivants.
Dans les deux cas,
le texte sur scène et le texte écrit par les romanciers sont
identiques (au mot près).
Dans les deux cas,
un texte pur, non écrit pour le théâtre. Dans les deux cas, un
projet monté à l'envers. J'entends par là, nés du désir d'un
comédien.
Emmanuel Noblet se
passionne pour le roman de Maylis de Kerangal au point de vouloir
l'assumer sur scène. Fred Pougeard rêve de « dire » (on
se souvient qu'il est avant tout conteur et diseur) la nouvelle de
Soljenitsyne. Il rencontre Alycia Karsenty qui est en train de
travailler sur le texte dont elle a obtenu une nouvelle traduction.
Un collaboration se met en place qui aboutit à la lecture
intermédiaire (magnifique) à laquelle j'ai assisté.
Une demande de
comédiens donc. Souvenir d'un cours de Julia Gros de Gasquet à
l'Institut d'Etudes Théâtrales. Elle s'interrogeait sur la
révolution du théâtre romantique : ne s'agissait-il pas, à
l'origine des pièces, du besoin, de l'envie des comédiens
d'apporter sur scène une représentation plus naturelle des
sentiments, à l'image de ce qui se passait dans le roman naissant et
dans la poésie ? Les grands auteurs de théâtre du début du
XIX ème siècle sont aussi des poètes qui ont marqué leur époque.
N'assistons-nous
pas de la même manière à un appel des comédiens ? A leur
besoin de textes « à mâcher », de mots à se mettre
dans la bouche et à offrir dans leur essence de mots, dans leur
confrontation, leur affrontement. Quitte à refuser la mise en scène
devenue plus que jamais la « mise en trop »(cf Vinaver).
Retour de « sire la Verbe » ? Pourquoi pas, mais
avec un glissement de ce « Verbe » arraché à une autre
forme d'écriture qui s'autorise la description, le commentaire et la
troisième personne. Cela n'est pas nouveau, on peut se souvenir de
« O ma Solange comment t'écrire mon désastre, Alex Roux »
de Noëlle Renaude qui a commencée à être jouée au début des
années 2000.
Besoin des
comédiens de reconquérir le plateau ? Besoin de ces mêmes
comédiens de retrouver la jeu (en variant des personnages assumés
et non incarnés, en cherchant un rapport immédiat avec le
spectateur) ?
Le texte La vie
obscure de Jospeh Danan,
publié comme « roman » m'avait déjà donné le
sentiment d'être un texte conçu pour la scène. (voir article
antérieur).
Un
spectacle écrit par le poète Pierre Soletti est programmé dans les
prochains mois. Auguste ne sait plus grand chose du monde
est un monologue, un travail en collaboration avec un
comédien-lecteur. Sa représentation nous en apprendra certainement
davantage sur l'évolution des performances du texte. …..