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lundi 20 juin 2016

Performance du texte et comédiens

Retour sur la rumination des performances du texte.
Après un entracte plus généraliste et une petite pause poétique, je recentre ma rumination sur La Maison de Matriona et Réparer les vivants.
Dans les deux cas, le texte sur scène et le texte écrit par les romanciers sont identiques (au mot près).
Dans les deux cas, un texte pur, non écrit pour le théâtre. Dans les deux cas, un projet monté à l'envers. J'entends par là, nés du désir d'un comédien.
Emmanuel Noblet se passionne pour le roman de Maylis de Kerangal au point de vouloir l'assumer sur scène. Fred Pougeard rêve de « dire » (on se souvient qu'il est avant tout conteur et diseur) la nouvelle de Soljenitsyne. Il rencontre Alycia Karsenty qui est en train de travailler sur le texte dont elle a obtenu une nouvelle traduction. Un collaboration se met en place qui aboutit à la lecture intermédiaire (magnifique) à laquelle j'ai assisté.
Une demande de comédiens donc. Souvenir d'un cours de Julia Gros de Gasquet à l'Institut d'Etudes Théâtrales. Elle s'interrogeait sur la révolution du théâtre romantique : ne s'agissait-il pas, à l'origine des pièces, du besoin, de l'envie des comédiens d'apporter sur scène une représentation plus naturelle des sentiments, à l'image de ce qui se passait dans le roman naissant et dans la poésie ? Les grands auteurs de théâtre du début du XIX ème siècle sont aussi des poètes qui ont marqué leur époque.
N'assistons-nous pas de la même manière à un appel des comédiens ? A leur besoin de textes « à mâcher », de mots à se mettre dans la bouche et à offrir dans leur essence de mots, dans leur confrontation, leur affrontement. Quitte à refuser la mise en scène devenue plus que jamais la « mise en trop »(cf Vinaver). Retour de « sire la Verbe » ? Pourquoi pas, mais avec un glissement de ce « Verbe » arraché à une autre forme d'écriture qui s'autorise la description, le commentaire et la troisième personne. Cela n'est pas nouveau, on peut se souvenir de « O ma Solange comment t'écrire mon désastre, Alex Roux » de Noëlle Renaude qui a commencée à être jouée au début des années 2000.
Besoin des comédiens de reconquérir le plateau ? Besoin de ces mêmes comédiens de retrouver la jeu (en variant des personnages assumés et non incarnés, en cherchant un rapport immédiat avec le spectateur) ?
Le texte La vie obscure de Jospeh Danan, publié comme « roman » m'avait déjà donné le sentiment d'être un texte conçu pour la scène. (voir article antérieur).

Un spectacle écrit par le poète Pierre Soletti est programmé dans les prochains mois. Auguste ne sait plus grand chose du monde est un monologue, un travail en collaboration avec un comédien-lecteur. Sa représentation nous en apprendra certainement davantage sur l'évolution des performances du texte. …..