Quand le bus m'avait posé
rue Berri, je m'étais retrouvé au milieu d'une telle poudrerie que
mon moral était à peu près à la hauteur de mes chaussettes et
aussi détrempé qu'elles. Un mur ! Un mur de neige ! On
n'y voyait pas à 10 mètres. Et soudain l'espoir : une
lumerotte dans la nuit. Une bonne étoile (décidément, je me
retrouvais avec mes Rois mages... maudite neige, pour un peu je
n'aurais pas été surpris d'être renversé par le traîneau du Père
Noël...). Finalement ce n'était pas l'étoile des bergers, mais
l'enseigne d'un dépanneur...Vite, un ristrette qui me rendrait un
peu plus vigousse.
Aimable, le dépanneur
m'avait servi un accent qui sentait le sirop d'érable, deux mots de
compassion et une eau marron claire, dans un grand gobelet de carton.
(il avait mis du lait..). C'était chaud, sucré, ça devait être du
café... Ah, l'expresso, place saint Marc, au soleil, l'été
dernier, avec Audrey ....
Il avait tout le temps
le dépanneur, pour me parler : personne n'osait s'aventurer
dans ce coin. La vie, elle était bien tapie à l'abri dans la ville
souterraine...
Soudain, mon téléphone
sonne...
-Allo, Jean-Rock ?
Il est coincé quelque
part, je ne comprends pas où, mais je sens que c'est loin, surtout
quand on a aux pieds des mocassins en simili cuir et un simple
blouson sur le dos. Il me conseille de rester à l'aéroport. Ils
sont équipés pour des cas comme ça. Ils vont certainement ouvrir
une salle et donner des couvertures. On se verra demain, à la télé
ils annoncent une accalmie.
Le dépanneur me sourit.
Il me propose de me garder dans la boutique pour la nuit, il ne ferme
jamais et se tait encore moins...
Il va falloir l'écouter
des heures et boire son eau chaude.
Décidément, maintenant
pour les reportages : uniquement les élections de miss et les
salons du vin et pas plus loin que la Garenne-Colombe....
Et ne pas imaginer la
tête d'Arnaud et des collègues....