Voilà tout vient d'une petite phrase sur la "crinière" de la miss qui l'a précédée. Et l'on crie au scandale. Raciste !
Oui il y a là une forme de racisme. On laisse des personnes sans aucune culture, qui ne maîtrisent pas la langue française diffamer une femme qu'elles ne connaissent même pas.
Le mot "crinière" dans le dictionnaire a plusieurs acceptions. Dont une "chevelure abondante ". L'usage de ce sens est attesté depuis 1671, dans un écrit de Boileau. Il apparaît dans la dernière strophe de La chevelure de Charles Baudelaire.
C'est très grave, cela veut dire qu'aujourd'hui, la vérité appartient à ceux qui sont le plus illettrés, le plus éloignés de la culture la plus primaire, celle qui consiste à connaître la langue que l'on pratique au niveau national. Une tweetteuse l'a judicieusement fait remarqué "les lionnes sont chauves" et elle en profite pour insulter la femme qui connaît la polysémie des mots (ce n'est pas une maladie).
Ce qui est très scandaleux, c'est que les journalistes prennent fait et cause pour les diffamateurs et participent notoirement à cette diffamation, sans chercher qui est le fautif dans l'histoire, celui qui parle un français correct ou celui qui ne le comprend pas et délire dans une aberration lexicale. (ce n'est pas une maladie non plus). Rappel la diffamation est punie par la loi. Peut-on imaginer que tous les journalistes et tous les directeurs de rédaction qui ont choisi de propager la diffamation basée sur une mauvaise compréhension seront condamnés ?
Certains journaux demandent même une destitution (Gala par exemple). Ils feraient mieux d'envisager l'achat d'un dictionnaire.
Ce qui est grave, c'est qu'on peut aujourd'hui accuser quelqu'un et le salir sur toutes les chaînes de télévisons à une heure de grande écoute, simplement en se fiant à une méprise.
Ce qui est grave c'est que personne ne fera de repentir public ou d'excuse.
Ce qui est grave c'est que ce genre d'attitude a conduit à dénoncer des milliers de gens pendant la Seconde guerre Mondiale et à les envoyer dans les camps d'extermination, il y a 70 ans seulement. Les faits prouvent que notre société serait pire que celle d'alors... Le racisme ... Où est-il ?
Ah un petite rappel, il était très à la mode, il y a une vingtaine d'années d'arborer une "lionne" qui était une coiffure toute bouclée sur l'arrière. A l'époque pourtant les lionnes ne portaient pas de crinière.
Doit-on voir là une victoire de Daech sur un nouveau théâtre de bataille : celui des medias qui peuvent servir sa cause en mettant en exergue (ce n'est pas une maladie) des allégations (ce n'est toujours pas une maladie) qui font croire à une universalité du complot contre la cause dont Daech se croit le tenant.
Quelques fables de La Fontaine (auteur de la même époque que Boileau) : Le loup et l'agneau, les animaux malades de la peste.
mercredi 20 décembre 2017
jeudi 16 novembre 2017
Vania mort pour la France (critique)
Vania est mort pour la France. Vania un Russe qui a abandonné sa mère patrie pour les bourbiers de la Marne de la Grande Guerre. Le texte est une commande du Département de la Marne dans le cadre de la commémoration du centenaire de la Première Guerre Mondiale. Pascal Adam a écrit le texte et Yves Béraud assure à l'accordéon la partie musicale.
Le conteur et comédien
Fred Pougeard incarne le texte.
Quel âge Vania a-t-il ?
Le texte est vague là-dessus, comme sur sa vie d'avant. On lui
imagine l'âge du comédien et sa mort en est plus cruelle, car Vania
commence par finir, par mourir lors de l'attaque commandée par
Nivelle. Il sera enterré dans le cimetière russe de Saint-Hilaire
dans la Marne ; Une chapelle et un petit ermitage assurent une
présence russe autour des nombreuses tombes.... voilà pour le
contexte historique et le rapport avec le département.
Les dernières heures de
Vania sont donc les premières minutes du spectacle. Moment fort que
porte avec force Fred Pougeard. L'issue est connue de tous,
impossible de faire du suspens sur cette offensive qui a coûté la
vie à tant d'hommes. La voix monte, le ton s'emporte, puis se
fatigue, cherche à retrouver de l'énergie, la dernière énergie.
C'est un exercice dans lequel excelle le comédien. (il faut avoir vu
L'oiseau qui dit non pour en
mesurer toute la puissance). Au moment final, comédien et auteur se
rejoignent dans une sobriété qui refuse le pathétique au profit de
l'humain.
Vania
n'a pas d'histoire particulière, il n'est qu'un parmi tant d'autres
avec ses doutes, ses peurs, ses rires, sa nostalgie (soutenue par des
chansons assez nombreuses). On lui ment sur la situation en Russie,
sur la situation en France, sur la situation en Allemagne. Il erre
d'une scène de combat à un hôpital, à une chambrée. Au sol, dans
un décor minimaliste, son pardessus, comme une défroque, ou une
chrysalide abandonnée au dernier instant. En adoptant un jeu un peu
en retrait à la façon des conteurs qui ne deviennent jamais
vraiment les personnages dont ils content l'histoire, Fred Pougeard
renforce l'universalité de Vania. Au spectateur de faire le chemin
supplémentaire.
Performance
du texte. Non, tout est trop réglé, mis en scène, répété,
maîtrisé.
Performance
de comédien, oui. Avec à nouveau ce sentiment déjà souvent
éprouvé que les comédiens de notre XXI ème siècle ne sont plus
en attente de personnages ou de grandes fresques, qu'ils se veulent
libérés des metteurs en scène re-créateurs des grands œuvres,
qu'ils cherchent dans des récits souvent poétiques mais à la
limite de l'écriture pour le plateau une autre façon de partager le
texte d'une façon nouvelle, plus directe, dans un contact réinstauré
entre la scène et le public.
jeudi 22 juin 2017
les animaux inéluctables (critique)
Elles sont trois, non
quatre car il faut aussi compter Jurate Trimakaité. Elles sont donc
quatre dont un renard, un ours, une belette....rassemblées pour
proposer « Les animaux inéluctables » d'après des nouvelles de Valdoné Budreckaité, une auteur lituanienne contemporaine.
Si Juraté Trimalkaité
a conçu le spectacle et en assure la régie, Marion Belot, Véra Rozanova et Thaïs Trulio se partagent le jeu et la manipulation des marionnettes (des animaux
que la taxidermie rend déjà vivants avant qu'ils ne soient
manipulés).
Les
trois histoires s'organisent autour du lien indéfectible qui unit,
dans un pays lointain à la fois si différent et si proche du nôtre,
l'homme et l'animal, de la vie à la mort et même au-delà de la
mort.
Chaque
protagoniste rencontre un animal, par hasard chez lui, un soir de
tempête, à sa naissance ou à une extrémité qui se révèle le
début d'un ailleurs.
Les
comédiennes passent de la manipulation à un jeu qui souvent se
rapproche du cirque ou de la danse ou du spectacle de clown. On sent
les articulations, les conventions qui sont à la base du travail,
mais pour y adhérer avec le ravissement d'un enfant que surprend
encore l'ingénuité. Il y a une grande part de candeur, de pureté
dans ce spectacle où la mort est poétisée et et s'apparente à la
féerie. Les enfants rient sincèrement parfois dans un moment qui
devrait être tragique, car le recul est important. Imaginez un jeune
homme qui danse le fox trot avec un renard venu le dévorer....
Il
y a aussi une grande part d'esthétisme, tout est beau, comme dans un
doux rêve d'enfant, les animaux, les personnages, les lumières, le
décor, sobre mais efficace (un canapé, un manteau qui enfante puis
devient une sorte d'exosquelette) et la scénographie qui enroule
toute l'histoire puis la déroule.
De
la maquette présentée à l'Ecole Nationale Supérieur des Arts de
la Marionnette de Charleville-Mézières, a surgi un spectacle de
grande qualité technique (trois formes de manipulation), de grande
qualité poétique et esthétique. Qu'on aime ou non le monde des
marionnettes, on trouve dans les Animaux
Inéluctables
émotion et prétexte à la réflexion. Un cocktail qu'on ne peut en aucun bouder bouder.
samedi 4 mars 2017
La position de la culture
L'artiste
genou à terre
embrasse la main
du responsable des subventions
main grasse et turgescente
position de la culture
les lèvres sur la main
fellation culturelle ou financière ?
genou à terre
embrasse la main
du responsable des subventions
main grasse et turgescente
position de la culture
les lèvres sur la main
fellation culturelle ou financière ?
lundi 20 février 2017
Il faut faire circuler une pétition
Une pétition circule pour faire pression sur les futurs présidentiables : il faut obtenir qu'ils renoncent à confier à des entreprises privées le contrôle des excès de vitesse. Je suis d'accord à cent pour cent. C'est du racket organisé. C'est vrai depuis quand faudrait-il accepter que le droit de rouler trop vite, de mettre la vie des autres en danger soit puni ! Et puis non mais quoi : on ne pourrait pas enfreindre la loi librement ! On va voir ce qu'on va voir. A bas les lois !
Je voudrais mettre en lumière d'autres formes de racket organisé contre lesquels il faudrait se révolter:
1. Il y a des gens qui me réclament un ticket quand je veux rentrer au cinéma ou dans une salle de spectacle. C'est du racket. Il faut les supprimer !
2. Il y a des vigiles au niveau des caisses des magasins. Ils m'empêchent de me servir comme je veux. Ils m'obligent à payer les articles que je prends. C'est du racket.
3. Quand je prends un verre en terrasse, même chose, il faut que je paye. C'est du racket !
Ensuite revenons sur l'atteinte à la liberté. J'exige d'avoir aussi le droit d'enfreindre la loi. Je n'ai pas de voiture, alors je veux avoir le droit de tuer disons cinq ou six personnes par an. Evidemment sans perte de point sur mon permis de vivre. D'abord mon voisin qui a un regard qui ne me plaît pas, puis ce chanteur qui braille, ah oui la présentatrice de cette émission et puis je trouverai bien de quoi compléter...
Je vous semble fou, pourquoi moi ? et pourquoi pas ceux qui signent la pétition pour avoir le droit de ne pas respecter le code de la route.
Et si on faisait une pétition pour avoir le droit de griller les feux rouges, une autre pour que les voitures vertes aient le droit de rouler d'un autre côté que les autres ( à gauche dans les pays où on roule à droite et à droite dans les pays où on roule à gauche).
Faisons une pétition pour tout cela. Et attendons d'avoir un 1 million de signatures.
Enfin attention : tous les signataires sont en train de constituer la plus grande base de données de chauffards de la Terre, avec nom, adresse, e-mail. Il ne restera plus qu'à les pêcher comme dans un banc de délinquants auto-proclamés.
Qui commence la pététion?
Je voudrais mettre en lumière d'autres formes de racket organisé contre lesquels il faudrait se révolter:
1. Il y a des gens qui me réclament un ticket quand je veux rentrer au cinéma ou dans une salle de spectacle. C'est du racket. Il faut les supprimer !
2. Il y a des vigiles au niveau des caisses des magasins. Ils m'empêchent de me servir comme je veux. Ils m'obligent à payer les articles que je prends. C'est du racket.
3. Quand je prends un verre en terrasse, même chose, il faut que je paye. C'est du racket !
Ensuite revenons sur l'atteinte à la liberté. J'exige d'avoir aussi le droit d'enfreindre la loi. Je n'ai pas de voiture, alors je veux avoir le droit de tuer disons cinq ou six personnes par an. Evidemment sans perte de point sur mon permis de vivre. D'abord mon voisin qui a un regard qui ne me plaît pas, puis ce chanteur qui braille, ah oui la présentatrice de cette émission et puis je trouverai bien de quoi compléter...
Je vous semble fou, pourquoi moi ? et pourquoi pas ceux qui signent la pétition pour avoir le droit de ne pas respecter le code de la route.
Et si on faisait une pétition pour avoir le droit de griller les feux rouges, une autre pour que les voitures vertes aient le droit de rouler d'un autre côté que les autres ( à gauche dans les pays où on roule à droite et à droite dans les pays où on roule à gauche).
Faisons une pétition pour tout cela. Et attendons d'avoir un 1 million de signatures.
Enfin attention : tous les signataires sont en train de constituer la plus grande base de données de chauffards de la Terre, avec nom, adresse, e-mail. Il ne restera plus qu'à les pêcher comme dans un banc de délinquants auto-proclamés.
Qui commence la pététion?
mercredi 25 janvier 2017
Avignon le OFF j'allais l'oublier 2
Mais dans les rues
passantes, les anciens axes romains du Vieil Avignon, cardo et
decumanus....
Peut-on parler de
théâtre ? Oui, ne soyons pas intellectualistes, l'atellane et la
farce ont toujours coexisté avec la grande comédie et la tragédie.
Ce qui choque peut-être le plus les amateurs de théâtre, c'est la
situation géographique et l'emprise visuelle de ces spectacles :
vous avez le choix à tout heure entre les pires créations du
théâtre de boulevard (non, le théâtre de boulevard est codifié
et répond à des critères éthiques), jouées par des comédiens
dont on peut se demander s'ils sont professionnels ou amateurs, des
humoristes qui confondent spiritualité et impudence et qui croient
être drôles parce qu'ils sont vulgaires à bon marché. Qu'on ne
m'accuse pas de pruderie. J'aimais beaucoup Cabu et Charb, les hommes
et leur travail. Je hurle de rire devant certains dessins de Charlie
Hebdo. (mais parce que même la pornographie peut servir à nous
éclairer sur notre monde) Jean Pierre Verheggen est un de mes
auteurs préférés et je suis parfois sidérée par la justesse de
son observation de notre société. Ce qui ne m'empêche pas de
savourer l'écriture de Musset, de Pierre Michon ou de Marcelline
Desbordes-Valmore. Mais dans ces théâtres, on sent avant tout le
fric. Il faut faire de l'argent en attirant un public facile qu'on
flatte dans ce qu'il a de plus trivial. Les producteurs savent qu'il
y a de l'argent à prendre et se servent. Les comédiens y
trouvent-ils leur compte ? Et les spectateurs ? On les
rencontre plus souvent à la sortie de films « franchouillards »
comme si la France était un pays de « 50 millions d'abrutis »
(merci Michel Sardou). De ces spectacles, les critiques ne parlent
pas, trop occupés à descendre des pièces qui ne rentrent pas dans
la norme. Il n'y a donc aucune raison qu'ils ne se multiplient pas de
façon exponentielles au détriment des autres propositions. Tous les
ans des salles se reconvertissent pour les accueillir … Au royaume
du fric, le théâtre doit faire profit.
Il s'agit là d'une
peinture très grossière et très orientée, d'une caricature bien
en dessous ce que pouvait faire Cabu, mais la question se pose à
Avignon encore plus qu'ailleurs : qu'est-ce que le théâtre
aujourd'hui ?
Avignon le OFF j'allais l'oublier 1
Avignon le OFF, j'allais
l'oublier... Et puis samedi, retour sur le sujet.
Avignon le OFF magnifique
et formidable (au sens étymologique), génial et terrifiant.
Là encore la démesure a
atteint un tel degré qu'elle devient un obstacle. Trop de
spectacles, chacun se réclamant d'un nombre de représentations
phénoménal, d'un prix dans un endroit inconnu, d'une nomination à
un palmarès, d'une longévité qui laisse pantois...
Le meilleur y côtoie le
pire et le pire trouve toujours pire que ce que l'on pouvait
imaginer.
Il y a là de jeunes
compagnies, de jeunes comédiens qui croient encore au mythe et
rêvent que leur présence au festival va enfin les faire sortir de
l'ombre, que leur travail va enfin trouver la reconnaissance qu'il
mérite. Ils sont souvent assez bons, mais la cohue les acculent à
une porte un soir où le tractage à nouveau a été l'occasion de
rejets ou de commentaires. Et ils partent en considérations
désabusées sur le sort du théâtre, des comédiens, de la culture
dès que vous vous arrêtez un peu auprès d'eux. Ils défendent cher
la peau de leur création comme Cassandre devant les remparts de
Troie ou Saint Jean-Baptiste dans le désert...
Il y a là des compagnies
plus solides pour qui le festival n'est qu'une étape...
Des compagnies ou des
scènes très reconnues, aux directeurs et metteurs en scène avec
déjà un beau passé. Ils sont dans le OFF par défi, par dépit,
parce que les places dans le IN sont accordées d'une façon qui ne
leur convient pas, parce qu'ils viennent malgré tout et pour prouver
à qui de droit que leur spectacle fait recette en Avignon. Ceux-là
n'ont pas trop à s'en faire. Leur nom se perd dans le dictionnaire
des titres, des auteurs, des metteurs en scène, des compagnies, mais
très vite ils attirent leurs attitrés et souvent jouent à guichet
fermé.
Il y a des comédiens et
des comédiennes que la télévision recrute pour des séries. Ils
sont là pour faire un peu de théâtre, « parce qu'ils sont
bons aussi sur scène, ce sont des acteurs complets ».Pour eux
pas de problèmes, la salle est pleine de gens qui viennent voir, tu
sais celui qui jouait l'inspecteur dans la série du mardi. Peu
importe ce que raconte la pièce ... tu sais on l'a vu en vrai.
Leur fusil a deux coups : vérifier leur notoriété et montrer
qu'ils peuvent être à la hauteur pour une prochaine fiction sur une
chaîne publique.
Là il y a encore
théâtre.
jeudi 19 janvier 2017
rumination longtemps après la soupe
Rencontre avec Jérôme
Thomas et discussion sur la « Soupe à tomber par terre de
Potagekamut ». (la soupe ).
Et une question qui
m'agite aujourd'hui. Quelle place occupe un second personnage pendant
une racontée ?
Je l'ai dit dans
l'article évoqué, j'avais été particulièrement sensible au
rapport clownesque qui unissait les deux conteurs. Nous avions un
clown blanc et un auguste à la limite de l'acteur et du personnage.
A cela s'ajoutent une réflexion menée avec un un autre conteur (le public du conte) et une expérience
personnelle : invitée par un couple d'amis à expliquer quel
est l'intérêt du conte au XXIème siècle, j'ai répondu par deux
contes : l'un très traditionnel – des frères Grimm- et
l'autre plus moderne dans son approche -un Nasreddin - . Nous étions
dans un contexte propice à l'observation. (N'allez pas imaginer que
j'utilise mes amis comme rats de laboratoire.. )
Très vite, le couple
s'est « individualisé » . J'avais en face de moi
deux personnes isolées qui entretenaient un rapport avec moi seul.
Regard uniquement fixé sur moi, sans tentative de de contact avec
l'autre pour une confirmation de compréhension ou une complicité
d'écoute (peut-être parce que les contes étaient courts).
Comment comprendre que la
présence d'un tiers dans le champ de vision ne puisse pas avoir une
incidence ?
Le troisième personnage
fausse la relation individuelle acteur/conteur – spectateur puisque
le conteur s'adresse à lui particulièrement à certains moments et
de façon officielle. Ses gestes et ses interventions captent aussi
le regard et l'attention du spectateur qui sort de la relation
privilégiée avec le conteur.
Donc une question. Le
second personnage, le comparse, l'auguste (dans la soupe à tomber
par terre notamment) ne peut-il être compris comme une
personnification, incarnation du spectateur ? Donnant à voir le
miroir su spectateur autorisé à manifester de façon primaire ses
émotions et ses réactions ? Une figure qu'on pourrait
apparenter au « spectateur organique co-acteurs des
performances (celles du texte plus spécialement) ?
Le question reste
ouverte.
lundi 16 janvier 2017
Magie d'ombres et autres tours (critique)
Un spectacle de Philippe
Beau est rare. Rare parce qu'il ne se produit pas très souvent. Rare
parce qu'on est sûr d'y trouver des qualités exceptionnelles.
Alors quand on en
programme un, il faut s'y précipiter.
Des ombres... Oui, me
direz- vous, le petit lapin, l'oiseau, le cygne... On connaît.
Connaissez-vous
l'éléphant ? Le dinosaure ? Les pattes d'un guépard ?
Un chameau ? Une grenouille ? Un cheval, un crabe, une
chouette ?
Et des mains qui
s'élèvent , se prennent, se déprennent dans une danse
serpentine... Volutes de mains, ballet, mouvements ondulants qui
glissent vers une figure ou la font disparaître dans un arpège.
L'enchaînement de ces
ombres finit par dire plus que ce qu'on pouvait imaginer.
Et vous ne connaissez pas
ces dernières créations qui font apparaître sur la toile les
mythes du cinéma contemporain ou les personnalités de la politique.
On oscille entre le rire et l'admiration quand les mains par petits
ajustements forment le portrait fidèle. On comprend alors combien
l'ombre est encore un art d'aujourd'hui, tout en se rappelant que
dans des temps anciens plus troubles, elles permettaient de vénérer
le Roi ou l'Empereur.
Et puis, il y a toujours
la fascination de Philippe Beau pour les premiers temps du cinéma.
Le spectacle est ponctué
par des cartels, comme les vieux films muets. (tout le spectacle est
absolument muet d'ailleurs, sans que cela crée la moindre
lassitude). Et à plusieurs reprises de cours extraits de film
anciens permettent d'introduire sur le plateau des tours de magie
qui, s'inspirant de ceux évoqués par Méliès, Chaplin ou Besson,
renouvelle l'exercice. Il ne faut pas oublier que Philippe Beau est
certes, magicien et ombromane, mais aussi conseiller historique en
tours de magie.
Portés par une musique
parfaitement adaptée, vous passez des ombres au cinéma aux tours de
magie, dans une ronde que les mains dessinent sur la toile et vous
glissez d'émerveillement en émerveillement, heureux de vous laisser
abuser, comme aux premiers temps des hommes, à l'époque où le feu
dessinait sur les parois les premiers films de l'humanité.
Philippe Beau est
vraiment un magicien ….
dimanche 8 janvier 2017
Avignon le IN
J'ai été bien injuste
dans le précédent article sur le public du festival IN. Mais la
caricature était à peine forcée. J'ai vraiment rencontré (et je
ne suis pas la seule, d'autres « tracteurs » pourront
vous dire la même chose) les personnes que je décris dans
l'article. Certains disaient : « j'évite les zones du IN.
Il n'y a pas de discussion possible. »
Que dire du IN ? Si
ce n'est que les places en sont vendues très longtemps à l'avance
à des associations d'amis des Centres Dramatiques Nationaux et
autres Scènes Nationales. Elles sont chères (elles se basent sur
les tarifs des salles parisiennes), sauf si vous bénéficiez de
réductions liées à des abonnements à l'année aux théâtres
évoqués plus haut. Les gradins du IN accueillent donc en très
grande majorité une élite culturelle, une élite bourgeoise ou
financière, ainsi qu'une élite politique, venues autant pour le
prestige que pour le théâtre.
Si les salles ont des
jauges raisonnables qui permettent de profiter de la représentation,
la Cour d'honneur est arrivée à une saturation de l'espace. Là où
Vilar avait imaginé quelques centaines de places dans un rapport de
proximité, on accueille aujourd'hui 2000 personnes. Ceux qui se
trouvent au 27ème rang, ne voient plus que des fourmis sur scène et
imaginent le comédien plus qu'ils ne le distinguent. Un système
très complexe rapporte le son dans des haut-parleurs qui se trouvent
au sol devant les sièges des gradins. Chacun a son propre accès au
son, avec un léger différé semble-t-il pour les derniers rangs,
mais à cette distance, on ne peut pas voir les visages. L'écoute
est donc merveilleuse. Pour le reste, il faut surtout imaginer.
Je crois que c'est dans
ce sens qu'il faut prendre la mise en scène faite cet été par Ivo
Van Hove des Damnés. Il a
installé en fond de scène des écrans géants où étaient projetés
en direct des gros plans sur les acteurs, permettant à tous de
suivre heureusement le spectacle. Le lendemain, les critiques
allaient bon train : « Pour regarder cela, autant être
devant la télévision ! ». C'était oublié que dans les
grandes machineries, opéras ou comédies musicales données à Bercy
ou au Grand Stade, on a recours à ce système. Mais je l'ai déjà
dit « il ne faut pas confondre Avignon et théâtre
populaire ».
Je
ne dirai rien non plus sur le « proximité de l'acteur ».
Théâtre
de la démesure dans les lieux, Avignon attend aussi la démesure
dans la durée des spectacles. On se souvient du Soulier de
satin qui se terminait dans les
premiers feux de l'aurore et où l'on trouvait les viennoiseries en
sortant de la Cour, ou de la Trilogie
de Mouawad qui durait à peu près aussi longtemps et pour laquelle
on avait prévu une pelouse et des couvertures pour que les
spectateurs puissent dormir dans l'enceinte du Palais des Papes avant
de retrouver l'énergie pour poursuivre leur rôle de public
attentif.
Je
vous dispense de toutes les conférences et débats organisés en
parallèle passionnants, mais au combien hermétiques pour le commun
des mortels. On comprend dès lors pourquoi la foule erre dans les
rues à la recherche de la magie tant proclamée. Elle est la sœur
de celle qui erre sur les avenues de Cannes sans accéder aux salles
ou de celles qui regarde les restaurants et les boîtes branchées de
la Côte d'Azur. On comprend aussi pourquoi elle trouve sa propre
fête théâtrale dans les spectacles de rue, les parades et les
théâtres de la Rue de la République.
vendredi 6 janvier 2017
Avignon donc
Avignon, donc.
Il y avait 7 ans que je
n'avais pas mis les oreilles et les yeux au festival.
A l'époque, je suis une
équipe qui analysait les spectacles du IN pour en tirer du matériel
pédagogique.
A l'époque, j'avais peu
fréquenter le OFF, trop de travail (plusieurs spectacles par jour,
dont les interminables de la cour d'honneur, le travail ensuite, puis
la mise en commun...)
Cet été, j'accompagnais
un spectacle du OFF. Je passais beaucoup de temps en communication
autour du spectacle, dans les rues, auprès des représentants des
structures officielles.
J'avais décidé
relativement tard de venir et je n'avais pas réservé de places pour
le IN.
J'avais limité ma
consommation à 2 ou 3 spectacles par jour... avec modération....
Choix difficile, plus que
difficile.
Le programme du OFF c'est
127 pages avec parfois cinq ou six spectacles présenté sur une
page.
C'est 129 lieux de
représentation, auxquels il faut ajouter les spectacles de rue (les
officiels) et ceux qui s'incrustent, les parades...
Chaque jour on peut
assister à un peu moins de 1500 spectacles... (autour de 1470).
Avignon « la plus
grand théâtre du monde » est aussi un temple de la démesure.
Parlons des spectacles :
vous imaginez bien qu'il est impossible sans une certaine culture de
faire son choix dans cette surabondance.
Les grands noms côtoient
les anonymes. Mais lesquels seront les meilleurs serviteurs d'un
texte, d'un auteur. Si l'on peut miser sans crainte sur quelques uns,
les autres se révèlent parfois plus que décevants... Marcher dans
les rues d'Avignon après 10 heures du matin est une expédition.
Vous en pouvez pas faire un pas sans être abordé par un
« tracteur » qui vous vante le spectacle de la compagnie
qu'il accompagne. Les comédiens des salles descendent sur les
trottoirs, les placettes pour essayer de convaincre et d'attirer un
public déjà assailli. Tout est bon pour se faire remarquer :
les costumes de scène mais aussi les déguisements qui sembleraient
outranciers au carnaval de Dunkerque et qui surtout n'ont pas la même
vocation festive.
Il faut dire que le
public n'est pas assez nombreux pour fournir à chaque salle le quota
de spectateurs. Il faut se battre pour couvrir ne serait-ce que les
frais de location du théâtre. Se battre c'est à dire capturer le
public avant les autres.
C'est drôle, on se
retrouve des siècles en arrière, sur le Pont Neuf. C'est une belle
approche historique... Aux XVIIème et XVIIIème siècles la lutte
était-elle aussi âpre ?
Les spectateurs du IN
regardent avec un certain mépris cette agitation vulgaire,
puisqu'ils sont contraints de fréquenter les mêmes rues …. Gare
aux « tracteurs » du OFF qui oseraient les aborder... Ils
ne discutent que rarement avec les spectateurs du OFF, ne fréquentent
pas les mêmes restaurants, les mêmes bars, les mêmes jardins, les
mêmes cours. Ils ne pénètrent dans cette jungle hostile qu'avec le
guide du routard Jérôme Garcin ou le guide vert de Fabienne
Pascaud.
« Vous avez aimé
« au bonheur des vivants », mais il ne figure pas dans la
liste des 10 spectacles à voir.... ». La bouche se pince, puis
la lippe descend en un sourire condescendant. Pauvre, vous n'êtes
pas … Enfin, comment pouvez-vous.... ?
Pendant ce temps-là, un
homme aux seins nus format L et aux fesses en plastique passe en
poussant un landau où une appareil hurle « Folles en scène ce
soir à 18 h 30 »....
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