Il y a elle, il y a lui. Mais sont-ils vraiment deux ?
Frère et sœur, chien et
chat, chat et souris, enfants d'une cour de récréation,
amoureux-amoureuse, personnages du Roman de Renart.
Quand ils chaussent leur
masque (de renard et de blaireau), ils deviennent les uniques
témoins, les uniques mémoires d'histoires qui se racontaient, qui
se racontent encore, où … là d'où ils viennent.
Ils connaissent les
histoires de 7 personnages et un jeu avec le public les fait
resurgir, dans un minuscule castelet dont ils peuvent devenir un
temps les marionnettes démesurées.
7 histoires que le hasard
d'un amstragram poétique va faire surgir de façon aléatoire, en en
réservant une partie, parce qu'il faut qu'il reste toujours des
mystères et parce qu'il faut laisser la place à d'autres
rencontres.
Elle a des airs de petite
fille sage, mais n'hésite pas à lui cacher ses jeux, ou à le
forcer à ranger les fantoches dont ils se sont servis. Elle fait des
mystères, y associe les spectateurs, puis redevient la bonne élève.
Lui semble un garçon
casse-coup, casquette et marcel, il jongle avec une balle, comme un
autre garçon taperait dans un ballon parce que c'est pas pour les
filles. Il la poursuit avec une tige devenue épée, ils se battent
presque, en personnages de commedia dell' arte, puis redeviennent les
porteurs d'histoires.
Il ne vivent que très
rarement les récits. « Mme …. racontait une histoire, c'est
celle de X... et nous allons à notre tour vous la raconter. »
Et le récit part, petit pantin à l'appui, décor de carton qui se
montre tel, cela commence dans la boîte, puis les marionnettes
débordent, s'installent sur les bras, sur la tête, incluent le
corps du manipulateur dans leur univers théâtral. Et tout en
contant l'histoire, les deux comédiens interprètent « les
montreurs » , jonglent , jouent du bandonéon...
On découvre une
infirmière qui a peur de piqûres et qui trouve une autre façon de
soigner les malades, un vieux marin qui renoue avec l'enfant qu'il a
été, un laveur de nuage, deux clowns acrobates qui partent à la
recherche d'un géant invisible...
Le texte a été écrit
par le poète Pierre Soletti, c'est une garantie de retrouver un
monde poétique, à la limite des rêves d'enfants. La langue est
belle, riche de « subtilités de langage », jeux de mots,
assonances, homogrammes, allusions à d'autres textes, d'images, de
métaphores. On est dans un univers de légèreté, même pour
aborder les sujets les plus graves.
Mateja Bizjak Petit, qui signe la mise en scène, a su exploiter cette originalité du texte et conduire les comédiens-manipulateurs vers un univers de l'enfance dans lequel les adultes se retrouvent, arpentant des chemins autrefois parcourus.
Mateja Bizjak Petit, qui signe la mise en scène, a su exploiter cette originalité du texte et conduire les comédiens-manipulateurs vers un univers de l'enfance dans lequel les adultes se retrouvent, arpentant des chemins autrefois parcourus.
Jurate
Trimakaite et Jimmy Lemos
sont remarquables de spontanéité, de candeur et de rouerie, prenant
les spectateurs dans leurs jeux et s'en faisant des complices
(enfants et adultes confondus).
Jimmy
Lemos est, outre un acteur très juste, un jongleur extraordinaire :
la balle qu'il utilise semble douée de sa propre vie et se déplacer
seule autour de lui.
Quant
à Jurate Trimakaite, elle a, en plus d'un charmant accent lituanien,
une voix extraordinaire qui lui permet de faire quelques passages de
chant lyrique...
C'est
un très beau moment, un de ces moments de grâce et de magie que le
théâtre pour enfants est presque le seul à proposer aujourd'hui.