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jeudi 20 octobre 2016

critique : la nuit sera calme

Spectacle lecture : Jacques Gambelin lit Romain Gary.
La soirée s'annonce belle. La nuit sera calme (c'est le titre du spectacle). Il a été crée en 2007 à Manosque. Cela veut dire qu'il tourne depuis près de 10 ans...
Le livre qui sert de base est un entretien fictif publié en 1976. Romain Gary imagine qu'il se confie au journaliste François Bondy, un ami d'enfance.
La langue est belle, pleine d'images, d'ironie, de raccourcis, de rappels et d'échos. Les idées n'ont pas vieilli et trouvent un écho dans les grands questions d'aujourd'hui. La truculence de certaines phrases provoque des gloussements faussement outrés à ma voisine, gloussement qui doivent parvenir sur scène car ils sont suivis d'un agacement imperceptible sur scène.
Pourtant tout est fait pour aseptiser la lecture ou du moins pour concentrer sur le texte.
Mise en scène réduite au minimum. Jacques Gambelin reste assis à un bureau pendant l'heure et demi que dure le spectacle. L'éclairage bleu ne laisse en couleur chaude que le rectangle occupé par le comédien qui est un « tronc » qui bouge un peu les bras, qui boit un verre d'eau (très lentement et à plusieurs reprises). Il répond aux questions d'un personnage invisible concentré dans un magnétophone placé sur scène et que le comédien manipule.
Le jeu est clair, sobre, tout en nuance, n'allant jamais dans le forte... ton de confidence très étudié...
Alors performance du texte : absolument pas.
Certes la lecture est visible : Jacques Gambelin tourne les pages d'un livre posé sur un pupitre de table. Mais la voix n'est pas celle de la lecture, elle ne rend pas la découverte du texte. On sent trsè vite que le texte est récité et que le livre n'est que le prétexte d'un jeu dont personne n'est dupe.
La voix est beaucoup trop travaillée, l'interprétation minutieusement calculée, en léger retrait...
Le public dans la première partie est placée en situation d'observation. Pendant très longtemps le dialogue se fait entre le comédien et le magnétophone : les deux voix sont clairement concentrées sur le plateau. Le public se trouve derrière le 4ème mur.
Dans la toute dernière partie, la voix du journaliste se trouve placée derrière le public, et le comédien lève davantage la tête pour aller vers elle. Il passe alors à travers le public et lui donne une consistance, mais très artificielle.

Non, il ne s'agit pas d'une performance du texte, ni d'une lecture. IL s'agit d'un très beau texte merveilleusement servi par un grand comédien. Un spectacle comme « Réparer les vivants » (voir article antérieur) mais sans l'investissement du corps.