Une fin d'après-midi ou
un début de soirée autour d'un conteur, autour d'un mythe.... et
quelque chose d'ancestral, d'atemporel qui se met en place.
Comme tous les ans,
l'annonce du Festival Oralia de Rethel se fait à Reims sous forme
d'un spectacle en avant première.
Cette année, le conteur
ardennais Philippe Vaillant offrait le mythe d'Oedipe.
Le public était venu
nombreux (compte tenu de l'heure, du lieu et du propos) « se
durcir l'oreille, coude à coude venu(s) se la faire confirmer
l'histoire du tout premier estropié chutant dans le noir pour avoir
osé la souillure suprême. » comme le dit Joël Jouanneau.
Le mythe d'Oedipe est
peut-être le plus célèbre mythe venu de l'Antiquité, le seul à
être universellement connu et universellement exploité encore de
nos jours. Peut-être parce qu'il parle de l'homme, de ses amours et
de l'incapacité à lutter contre le destin.
Philippe Vaillant
improvisait, accompagné d'un guitariste (Franck Ladouce), lui aussi
en improvisation. Si les refrains du conteur étaient de toute
évidence rédigés et étudiés, le reste du texte se formait au fur
et à mesure de l'avancée dans le mythe. Une narration toute en
lenteur, revenant, reculant, précédant sans risque étant donné
la célébrité de l'histoire, une narration qui laissait une large
place au suspendu, au silence. Pas de temps mort pourtant, mais
l'alliance lu repos de la parole et de la musique conduisait les
spectateurs vers une émotion que renforçait la suite de l'histoire.
Il était étonnant de voir à quel point le public était en attente
et en communion avec le mythe, pourtant usé. Il semblait que chacun
le découvrait dans son tragique et son déchirement. Un public uni
dans une communion d'empathie ou un public replié individuellement
sur les vibrations intérieures que le mythe et la musique
suscitaient. Je crois qu'il y avait autant de communion
spectateur/conteur que de personnes dans le public. Ce fut un moment
d'une grande richesse émotionnelle...et pour moi, la découverte à
des millénaires d'écart de ce qu'était un aède et du pouvoir
qu'il exerçait sur une assemblée. Pourquoi écouter un mythe aussi
connu s'il n'y avait pas la notion du carmen, du chant, du charme ?
Alors performance du
texte ? Un mythe est un texte fondateur, pourtant je n'ai le
sentiment d'avoir assisté à une performance du texte.
Il faudra approfondir
cela, en s'aidant des recherches de mon amie que je publie de temps
en temps. (voir les articles antérieurs).
Il y avait peut-être
aussi trop de magie dans cette soirée pour que la notion de
performance y trouve sa place.