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mardi 20 octobre 2015

occupation 4/7 (nouvelle)

Hasard des rencontres esquivées. Corps dépeuplés, maisons vides aux portes en toiles d'araignées, corps surpeuplés, où à chaque balcon des figures différentes vous interpellent. On promène son corps entre deux repas, deux sommeils...J'agite une marionnette de l'intérieur. Je suis entrée dans un oripeau en peau de femme. Comme ces ours de foire, défroques de fourrure synthétique dont se revêtent les saltimbanques et qui font peur aux enfants parce qu'ils ont lu dans le programme que l'ours ferait peur aux enfants.
Les couloirs anonymes, les salles anonymes, la chambre anonyme. Non, une grande photographie, reniée par une autre avant moi - longtemps avant ?-, ou message d'un passage entre deux histoires, entre les pans d'une biographie ressoudée. Je sais mon histoire, de son début à ce corps, de la naissance de son corps à lui à mon corps de femme. Histoire aphasique que je baigne dans l'eau instantanéisé d'une cascade sur papier glacé, à perte de vue, de mon lit. Unique fenêtre vers un rêve de nature. Inventé ?
Au loin aussi, après l'enfilade austère, un lieu habité par un poste de télévision qui réunit d'autres fourvoyées.
Un soir, justement, lui, à la télévision. Réduit à l'épaisseur d'un écran plasma. Avec une voix nouvelle, celle du dehors, si dissemblable de celle que me transmettait l'oreille interne, un rien nasillarde. Ai-je parfois pris le temps d'une pause dans ses sinus, avant le grand éternuement ?
Une infirmière se précipite sur moi. Je dois sourire de revoir celui dont j'ai si souvent joué.

Si je le connais ?
Comme je le connais !

Un indice pour vous ? Je vous offre ma réticence. Regard vidé, bouche close sur les mots qui se recroquevillent.