Faut-il voir dans ces nouvelles
formes et dans l'intérêt qu'elles provoquent chez un public certes
restreint une « rréaction » aux crises qui traversent
le théatre aujourd'hui ?
Je veux entendre le mot
« réaction », non comme une démarche volontaire pour
créer quelque solution possible, ni comme une résistance acharnée
à une modification des codes théâtraux, textes, représentations,
rapports scène /salle. L'acception scientifique du mot me semble
plus appropriée, la réaction chimique de deux éléments qui
entrent en contact. De leur collision, de leur fusion va naître un
nouvel élément ou une nouvelle substance, un plastique dont on ne
connaît pas encore toutes les propriétés. Le texte revient se
heurter à la performance, à la scène qui l'a banni un temps, et il
se présente sous une forme plus brute, plus primaire.
« Réaction » aussi de
la biologie, lorsqu'un muscle répond à une impulsion électrique
extérieure (pour les cours avec dissection) mais aussi impulsion de
nos neurones, synapses... et qui dénotent une volonté de vie du
corps en dépit de tout, même d'une mort cérébrale. Une réaction
pour dire que même si on dit le théâtre moribond depuis tant de
décennies, il n'en finit pas de mourir et ses soubresauts se
traduisent en spectacles vivants. Peut-être même que ce qui nous
fascine dans le théâtre, c'est son art de mourir, plein de rappels,
de soubresauts, comme ces passages de bravoure de l'opéra lyrique où
le héros/l'héroïne tirent de leur agonie une richesse de vocalises
et d'airs si beaux.
Il s'agit donc bien de parler de
réaction et non de renouvellent. Ces formes ne sauraient, il me
semble, augurer d'un avenir du théâtre. Elle lui permettent de se
chercher, de s'aventurer dans des voies inexplorées, mais il faut se
garder de les ériger en parangon du théâtre futur.