Le théâtre doit affronter en
tout premier lieu une crise de la représentation.
Dans notre univers saturé
d'images, toute représentation est remise en cause. Je n'entends pas
seulement l'acte de représenter une pièce, de la jouer, mais la
représentation sous une autre forme du monde dans lequel nous
vivons. Comment pour une majorité des gens faire une différence
entre le cinéma avec ses scenarii écrits et les images soit disant
réelles d'une émission de télé-réalité ?
L'image enregistrée
(photographiée et filmée) se veut irréfutable, preuve manifeste,
mais, à cause de sa surabondance et de la surenchère qui s'opère
dans les medias, elle devient objet d'une possible contestation ,
d'une certaine méfiance, d'une fatigue ou d'un désintérêt. On ne
peut plus croire à ce que l'on nous montre, car tout devient
spectaculaire : l'ouverture d'un magasin, des licenciements, une
compétition sportive, une catastrophe naturelle, une manifestation
ou un meeting politique.
Quelle
place peut occuper le théâtre dans cette compétition de
reproductions, lui qui est censé, selon la logique aristotélicienne
être une représentation (une mimesis) du monde. Aristote explique
la nécessité au théâtre de proposer une forme de représentation,
de mimesis, par le besoin inhérent à la nature humaine de
représenter (imiter) et de regarder la représentation
(l'imitation). Denis Guenoun y ajoute le besoin d'intervenir dans la
représentation, signifiant que le besoin de l'homme d'aujourd'hui
n'est pas seulement de voir mais de faire
du théâtre1,
.« La
nécessité du théâtre, pensée,sur le mode aristotélicien,se
révèle donc comme foncièrement double: nécessité d'une pratique
(scénique) et d'une théorie (spectatrice). »2
1Denis
Guenoun, Le théâtre est-il nécessaire?,
****, Circé, 1997, p. 19
2Denis
Guenoun, Le théâtre est-il nécessaire?,
****, Circé, 1997, p. 40