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lundi 22 août 2016

un théâtre des soliloques ? (1)

Je reprends une part du travail confié par une amie sur les spectacles reposant sur le texte et la parole... Les performances du texte... 

Le monologue, après avoir connu un grand engouement dans le théâtre classique ou romantique où il constituait un passage de bravoure dont le comédien tirait gloire, avait traversé une période de désuétude. Odette Aslan1 voit dans l'apparition des pièces radiophoniques un renouveau de ce genre, base d'une forme de narration, qui pourrait aussi expliquer la forme souvent monologale que prend le spectacle adramatique de la parole.
La résurgence du monologue marque le théâtre contemporain et de nombreuses pièces actuelles, conçues comme des monologues s'appuient sur l'existence d'un interlocuteur muet que les mises en scène placent au sein du public.
Dans Le cas Jekyl de Christine Montalbetti, le docteur Jekyl s'adresse à plusieurs reprises à un ami, qui ne lui répondra jamais, dont l'évocation permet une adresse au public, une implication du public en témoin privilégié de la lutte croissante entre Jekyl et Hyde.
33 derniers soupirs de Fabrice Melquiot, monologue également, joue en permanence sur l'adresse à un public identifié,(celui de la salle), tout comme Commission centrale de l'enfance de David Lescot.
Peu de ressemblances subsistent entre le monologue de l’œuvre classique et celui auquel on assiste sur les scènes d'aujourd'hui.
La forme monologale a perdu la vertu démonstrative ou réflexive des grands textes classiques. Il ne s'agit plus d'un exercice de rhétorique, pause dans l'action, moment discursif, temps de parole aussi mais de raisonnement adressé on ne sait vraiment à qui, moment de bravoure où le spectateur, s'identifiant au personnage parlant, prenait l'occasion de s'interroger sur sa psychologie ou ses émotions. De son ancêtre classique, elle garde peut-être l’ambiguïté de l'énonciateur.
Je me suis demandée, sans trouver la réponse, s'il y avait corrélation entre le retour du monologue et l'engouement du public pour les spectacles de la parole, et le cas échéant, dans quelle proportion l'un influençait l'autre.



1Odette Aslan, L'acteur au XX ème siècle ethique et technique,Vic la Gardiole, L'entretemps, 2005, p. 228