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mercredi 27 mai 2015

Jean-Pierre Verheggen

Pourquoi voulais-je parler de ce poète sur ce blog ?
Parce qu'il est lié à de nombreux événements de ma vie, parce qu'il a involontairement et inconsciemment contribué à ce qu'elle dure encore.
J'ai découvert Jean-Pierre Verheggen dans la voix de Jacques Bonnaffé, il y a bientôt dix ans. Une lecture dans un festival dédié aux mots. Entre plaisir et réticence. La langue ne s'interdit rien et je me demandais comment l'on pouvait se dire poète et utiliser des vocables aussi triviaux. Cette réaction je l'ai retrouvée plus tard dans un stage. Une des femmes présentes a poussé un hurlement de pudeur offusquée à la lecture du texte : « Je vous trouve infiniment vulgaire ». Cachez ce mot que je en saurais voir...C'est peut-être cette réaction qui m'a permis de comprendre vraiment la poésie de Jean-Pierre Verheggen.
Oui, la langue joue volontiers de la trivialité, de la verdeur... C'est en cela qu'elle est révolte, révolte de la vie contre tout ce qui la muselle, la cloître et la légalise, tout ce qui la dévitalise et la sclérose.
Jean-Pierre Verheggen parle de tout en se donnant le droit d'en rire. La première victime de cette dérision : lui-même. Les autres victimes : tous les grands mots inventés pour faire croire à une véracité du langage et tous les sonne-creux de tous bords. La langue se moque de ceux qu'on nous présente comme modèles.
Chez Jean-Pierre Verheggen tous les mots ont permis de séjour, les plus archaïques comme les inventions phonétiques gourmandes, dignes de Rabelais. Les associations se font par sonorités, calembours, jeux de mots, pirouettes sonores. Et en cela cette poésie donne vite envie de la lire, de la crier, de la passer par le gueuloir. Elle se perd en logorrhées fabuleuses où l'on quitte le sens pour se laisser porter par la jouissance d'un vertige sonore.
Mais que cela ne cache pas l'autre aspect de son écriture : une immense érudition. Les citations en latins et en grec foisonnent, les allusions à la littérature, à la peinture, à la bande dessinée (il n'est pas Belge pour rien), à l'histoire, la géographie, les coutumes de tous les pays du monde sont si fines et si précises qu'elles peuvent passer inaperçues. Il faut reprendre et reprendre ses textes pour en mesurer toute la subtilité, tous les clins d’œil malicieux. On n'a jamais fini de lire ou d'entendre un texte de Verheggen., tant les poèmes ont des niveaux superposés.
Quand on accepte de se laisser aller, la jubilation n'est jamais bien loin...

Un palmarès très personnel (et qui peut varier un peu selon mes humeurs)
Poète bin qu'oui, poète bin qu'non ?
Du même auteur chez le même éditeur
On n'est pas sérieux quand on a 117 ans : zuteries
Sodome et Grammaire
Ridiculum vitæ précédé de Artaud Rimbur
Un jour, je serai Prix Nobelge
L'Idiot du Vieil-Âge : (Excentries)
Le Degré Zorro de l'écriture

A paraître en mai !: CA N'LANGAGE QUE MOI (Gallimard)

J'ai entendu quelques passages : de la truculence en perspective....